Le Neuf Fourneau,
ou de la coulée de fonte aux établissements frigorifiques.
Faisant face à la route du Marly allant à Arbre, s'élève une rangée de maisons basses, accolées les unes aux autres et qui paraissent dater d'une époque
ancienne. Qui se douterait qu'elles se trouvent sur le site de ce qui fut l'un des plus importants hauts-fourneaux de Rouillon?
Son origine est connue avec précision. En 1775, Charles de Lorraine, au nom de l'impératrice douairière Marie-Thérèse, accorde à Joseph Misson la permission "
de supprimer un des tournants de son moulin à moudre grains qu'il possède sur le ruisseau de Rouillon, pour le placer à un fourneau à fondre la mine de fer qu'il a
dessein de construire sur un terrain un peu au-dessus dudit moulin sur le même biez et coup d'eau " ( AEN. Département de Sambre et Meuse. N° 161 ).
Après construction, on trouve sur le site: en bordure de la route, un long bâtiment servant au remisage du charbon et des minerais, une petite maison, dix mètres
en arrière un haut-fourneau, à côté un bâtiments étroit et allongé bordant le canal d'amenée de l'eau et destiné à laver le minerai. Voir en annexe le premier plan
cadastral.
Avant de poursuivre, il convient d'expliquer comment l'eau était amenée à cet endroit. A la sortie de la forge Aminte, le Rouillon se précipite en une belle cascade
vers le fond de la vallée de Bableuse, où il va former une série de biefs, qui seront autant de réservoirs pour les usines: forges, fourneaux et makas. Toutefois, sur
le côté de la cascade, une vanne permet de diriger l'eau dans un canal de dérivation qui court à mi-pente pour alimenter successivement le " Neuf Fourneau et le
vieux moulin de Rouillon". Sur cette dérivation, on a aménagé un petit bief juste avant le lavoir à minerai et la roue qui actionne le soufflet du fourneau.
Le 15 novembre 1822, Charles de Moreau, la veuve d'Alexandre de Moreau et la veuve de Jean Baptiste Misson vendent à Frédéric de Montpellier et consorts: le
Neuf Fourneau, avec sa petite maison, les remises, le lavoir et toutes les dépendances. Le prix en est de 41400 francs ( AEN Protocoles notariaux n° 4911. Notaire
Gislain ).
Le 18 juin 1836, à son tour, la famille de Montpellier revend le bien à madame Licot de Nismes, veuve d'Auguste Bauchau, maîtresse de forges à Moulins-Warnant.
Au déclin de l'industrie du fer sur les petites rivières, Madame Licot revend, le 1 août 1861, à Alexis Joseph Baivy, industriel à Rouillon
" Un fourneau dit " Neuf Fourneau " avec halle à charbon, magasin, maison de facteur, cour, lavoir de minerai, biez, broussailles, canaux, aisances et
dépendances, formant un ensemble tenant du levant à Julien Baivy ( propriétaire du vieux moulin de Rouillon ), du couchant à un sentier ( celui, qui de nos jours
encore descend vers les étangs de Bableuse ),du Nord à la route ".
Alexis Baivy va s'orienter vers de nouvelles activités. En 1862, il démolit complètement le long bâtiment servant de lavoir à minerai et partiellement la halle à
charbon. Il transforme le fourneau en bâtiment d'exploitation, dans lequel il demande à établir un moulin à moudre le grain. Le 1 mars 1862, le secrétaire communal
d'Annevoie constate par note, qu'il n'y a pas eu de réclamation contre ce projet, aussi A. Baivy est-il autorisé, par ordonnance du 31 juillet 1862, à réaliser son
projet.
Mais une requête va bientôt le retarder. Julien Baivy qui exploite le vieux moulin de Rouillon, en aval de la dérivation, réclame contre le fait que la retenue d'eau du
nouveau moulin a été exhaussée de 43 centimètres, ce qui se traduit pour l'aval,par une perte d'eau estimée à 5 %.
L'ingénieur en chef des travaux publics jugeant la plainte recevable, contraint Alexis Baivy à rétablir la retenue, à la hauteur qu'elle avait avant les travaux. ( AEN.
Annevoie. Archives contemporaines n° 134 ).
Est-ce cette décision qui a persuadé M. Baivy à postposer la construction du nouveau
moulin ? Ce n'est qu'en 1882, que sa veuve et ses enfants installent, dans le bâtiment de l'ancien fourneau, un moulin à farine.
Quant au bâtiment en bordure de route, qui fut halle à charbon, il se transforme en une première maison avec bâtiment rural. C'est là l'origine des autres petites
maisons, dont nous parlions ci-avant. En effet, à l'intérieur du bâtiment rural, Charlotte Baivy, héritière du bien,aménagera, en 1893, trois autres maisons et une
remise. Les maisons seront vendues au début des années 1900, à plusieurs propriétaires.
A partir de 1893, l'emplacement de l'ancien haut-fourneau va devenir le siège de diverses activités. Tout d'abord, d'une peausserie qui durera peu de temps. A son
propos, le père de Mr Goffioul se souvenait que des écorces de chêne étaient stockées à côté de l'école de la rue du Marly, elles servaient au tannage des peaux.
La tannerie ne fut active que pendant deux ans. A-t-elle suscité des protestations en raison de la pollution et des odeurs qu'elle générait ?
La peausserie est remplacée, en 1895, par une fabrique de produits réfractaires. A cet effet, un four circulaire est construit en bordure de la route, dans le
prolongement de ce qui fut la halle à charbon. On y cuisait des briques qui serviront à la construction de maisons à Rouillon.
Moins de dix ans après, une nouvelle activité apparaît: le bâtiment de l'ancien fourneau est transformé en scierie de marbre exploitée par Mr Evrard. Une carte-vue
d'époque le rappelle.
La grande roue hydraulique apparaît attachée au flanc du bâtiment.
Un réservoir en fer recueille l'eau de la dérivation et la fait couler sur la roue. Le surplus s'évacue par la canal situé en contrebas en direction du vieux moulin.
L'année 1914 voit la fin de la scierie. Charlotte Baivy, propriétaire des lieux, y aménage un garage,qui servira, jusqu'à ce que le bien soit vendu, en 1923, aux trois
frères Debras, Jean-Baptiste, Paul et Victor.
Ils exploitant déjà le moulin d'en haut, n'empêche, ils en créent un nouveau, qui va mou- dre des aliments pour bétail, ce sera le moulin d'en-bas, toujours actionné
par la grande roue hydraulique. Sur le site, on remise également les chariots qui font le transport des grains,.
Le dernier avatar du " Neuf Fourneau " se situe en 1967. Les héritiers du bien, les familles Hins-Debras, le vendent aux Etablissements Nicolas Falize, Compagnie
beurrière et fromagère, qui transforme le moulin en installation frigorifique. Cela ne peut se faire qu'en modifiant le relief du site. La partie du vallon, qui allait jusqu'à
l'étang de Bableuse, est comblée. Sur le terrain ainsi recupéré, une annexe est construite contre les vieux murs du bâtiment où se sont succédé tant d'industries
diverses; fourneau, tannerie, fabrique de produits réfractaires, scierie de marbre et enfin meunerie.
Les forges et les industries du ruisseau
de Rouillon
Partie 2
Vue actuelle du bâtiment du Neuf Fourneau devenu le siège d'une instillation frigorifique.
Carte-vue de 1910 montrant le bâtiment du Neuf Fourneau, transformé de 1903 à 1914, en scierie de marbre.
En contrebas, le linge de la blanchisserie, dont le haut bâtiment se voit à l’arrière-plan.
Le vieux Moulin de Rouillon, ou de la meunerie à la blanchisserie
Un peu en contrebas du Neuf Fourneau, s'élève un groupe important de bâtiments, dont le passé industriel est très ancien: là se trouvait le vieux Moulin de
Rouillon. Son existence est avérée dès le 17e siècle. Des actes notariaux conservés aux Archives de l'Etat à Namur nous apprennent que ce moulin appartenait en
1641 à Nicolas Marotte seigneur d'Arbre, qui le cédait à bail à Pierre Toussaint et Marie Tournon, demeurant au Petit Montaigle. ( AEN Protocoles notariaux n° 89 ).
En 1647, le moulin est loué à Ph. Thirifail et Dieudonné Bodart, en 1651, à Pierre Toussaint, en 1674 à Laurent Romain.
Le cadastre de 1830, indique avec précision qu'on trouve là, en plus du moulin, deux bâtiments qui lui sont accolés, une maison avec une cour la séparant du
moulin, le tout appartenant à Charles de Moreau. Croquis en annexe.
Au partage de 1837, le bien devient propriété de Charlotte de Moreau, épouse de Gaiffier qui le vend en 1858 à Julien Baivy Logé régisseur de forges à Annevoie.
En 1868, ce dernier reconstruit partiellement le moulin, le modernise, agrandit son assise en lui incorporant les bâtiments annexes.
Au partage de 1896, le moulin à farine, la maison d'habitation et la cour qui les sépare, sont attribués à Victor Baivy Biot, qui vend le bien à Edmond Baivy. Ce
dernier en transforme complètement la nature: le moulin devient une blanchisserie en 1904, revendue quatre ans plus tard à Debrée Francq.
L'établissement se transforme encore en 1912: il est exhaussé, agrandi et prend l'aspect que nous lui voyons sur une carte postale de l'éditeur Nels. Vu d'arrière, il
apparaît comme une grande bâtisse de trois étages, partant à sa partie inférieure gauche une roue hydraulique, mue par l'eau du canal venant de la scierie Evrard,
située à une trentaine de mètres en amont. Le surplus de l'eau forme une cascade qui tombe dans le bief de la forge du trou.
Une autre vue typique de l'époque est celle de femmes mettant le linge a blanchir en l'étendant sur un pré entre le canal de dérivation et Bableuse. Le canal se
franchissait par un ponceau.
La blanchisserie est vendue en 1926 à René Wasterlain. Une carte postale de cette époque nous la montre, vue de la route. Une cheminée s'élève dans la cour. A
la façade on lit l'inscription " Grande Blanchisserie d'Annevoie ".
Un nouvel agrandissement intervient en 1935, la partie antérieure, sur la droite, est surélevée. Ainsi fonctionne la blanchisserie jusqu'en 1950, c'est-à dire jusqu'à
ce qu'elle soit revendue aux frères Debras qui la désaffectent, suppriment l'outillage pour en faire un magasin à grains.
Vers 1960, le commerce ayant pris fin, l'installation est mise en location. A une époque, dans les étages, il y eut un élevage de poulets qui fut détruit par un
incendie. Ce jour-là, la vallée de Bableuse s'emplit de l'odeur de poulets rôtis !
L'ancien moulin de Rouillon est vendu en 1968 par la famille Hins- Debras à Lebon-Jassogne, tenancier du dancing "Le Juan".
Le Fourneau du Milieu.
ou de la coulée de fonte à l'atelier de menuiserie
Si, en quittant la blanchisserie, on descend le chemin des forges, quelques mètres plus bas, se voit un bâtiment à l'état de ruine, dont le toit s'est effondré. On se
trouve devant l'emplacement de ce qui fut le fourneau du milieu.
Son existence est attestée depuis le 17e siècle, sous l'appellation de " Forge du Mitan ", propriété de Nicolas Marotte, seigneur d'Arbre et consorts.
En 1637, ledit Nicolas Marotte et Pierre Burlen, le cèdent par bail, à Valentin et Bastin Gendebien, lesquels le cèdent à leur tour, le 3 mars 1638 à Jean Bodart,
lieutenant-bailli de Bois-de- Villers ( AEN Protocoles Notariaux n° 86 )
En juillet 1647, nouveau bail par Nicolas Marotte à Baptiste Gendebien. Dans ces actes, il est indiqué qu'il s'agit de la " Forge du Mitan " mais à l'époque le mot
forge pouvait désigner aussi bien un fourneau qu'une forge proprement dite.
D'autres baux seront conclus touchant des forges et fourneaux de Rouillon mais étant donné que ces établissements étaient proches l'un de l'autre, surtout sur la
partie inférieure du rieu de Rouillon, qu'ils appartenaient souvent aux mêmes proprietaires, il n'est plus possible de préciser à quel établissement l'acte se rapporte.
De tout ceci, nous ne retiendrons qu'une notion: la preuve que l'industrialisation du Rouillon est plus que tricentenaire.
Citons un acte du 11 juillet 1672 par lequel Charles Zuallart et Marguerite Burlen, veuve de Robert Stainier, donnent en location à André et Jean Jacques Moreau,
deux forges à Rouillon, celle du Milieu et celle du Trou. Ainsi apparaît, dans la forgerie, le nom des Moreau, qui fonderont une sorte de dynastie de maîtres de
forges à Rouillon.
Quand les maîtres de forges durent prouver à l'administration de la République française, leurs titres de propriété, des personnes âgées vinrent témoigner en
février 1803, devant la justice de paix de Dinant. Ils déclarèrent que Charles Moreau possédait depuis 1772. un fourneau et un moulin à farine, à Rouillon et
qu'avant lui, ses ancêtres en avaient la propriété " depuis un temps immémorial " .
En 1830, le fourneau du Milieu appartient toujours à Charles de Moreau et comprend le fourneau proprement dit, un bâtiment de grande surface, que longe la route
Rouillon-Fraire et, à l'opposé de celui-ci, par rapport au fourneau, un autre bâtiment dit " remise aux minerai de fer ". Une cour de dix ares permet les
communications entre les installations. Voir en annexe, le plan cadastral.
En 1841, a lieu le partage des biens de Charles de Moreau entre ses trois enfants. Le Fourneau du Milieu et ses annexes, reviennent à sa fille Eulalie, épouse de
Ullain de Coppin, propriétaire à Floriffoux.
Déjà en 1845, un rapport sur l'état de la forgerie, note que le fourneau est au chômage. Rien d'étonnant dès-lors, à ce qu'il soit démoli en 1862 et converti en
maison avec bâtiment rural. Le grand bâtiment dépendant du fourneau est à son tour démoli partiellement, en 1865, pour permettre l'élargissement de la route. Une
dizaine d'années plus tard, l'ensemble est reconstruit, une sorte de villa avec jardin y est bâtie, qui servira un jour d'habitation à la famille de Coppin. Il s'agit de
cette villa qui existe toujours et qui présente curieusement deux petites tours factices, visibles de la route.
L'ancien haut-fourneau va subir aussi une transformation complète, dont les archives contemporaines d'Annevoie ( AEN n° 134) nous donne le détail. Le 5
novembre 1869, le baron Ullain de Coppin, sollicite l'autorisation de transformer en polissoir à marbre, l'ancien haut-fourneau. Etant donné qu'il s’est mis d'accord
avec la Dame Veuve Julien Baivy, propriétaire du moulin à farine en amont, au sujet de l'utilisation de l'eau servant aux deux installations, les points suivants sont
admis de commun accord: l
e seuil de la vanne de prise d'eau du moulin ne sera pas modifiée
les dimensions du canal d'adduction d'eau et les caractéristiques de la roue à augets sont définies
à la sortie du polissoir à marbre, un réservoir d'épuration des eaux sera établi pour ne rendre vers l'aval que des eaux épurées.
Le polissoir à marbre est installé en 1873, fonctionne jusqu'en 1911, puis sera transformé par Charles de Coppin de Grinchamps en menuiserie actionnée à la fois
par une turbine à eau et un moteur à essence.
La remise à minerai qui servait à l'ancien fourneau, subit plusieurs transformations, pour devenir successivement hangar et écurie en 1878, bâtiment rural en 1893,
puis maison avec hangar en 1910. Cet ensemble existe encore: la petite maison qui fut occupée quelques années par le maître-ouvrier, qui avait la menuiserie en
charge, est aujourd'hui inoccupée et tombe en ruines, à l'ombre du gros tilleul tout proche.
En 1925, a lieu la succession de Charles de Coppin de Grinchamps. A ce moment, le bien est encore complet et comprend: l'atelier de menuiserie, la villa avec
jardin, qui touche à la fois, au chemin des forges et à la route de Fraire, la cour au grand tilleul et enfin, la petite maison avec hangar.
L'atelier de menuiserie fonctionne aussi, on y fabrique notamment des chaises pliantes, dont la commercialisation rencontre quelque succès. Puis ce fut la fin de
l'entreprise, l'atelier de menuiserie devint une remise.
En décembre 1936, la totalité du bien est vendue par la famille de Coppin à Elise Rosier , qui ne garde que la villa et revend le reste, c'est-à-dire l'ancien atelier, la
cour et la petite maison. Les acheteurs, en juin 1937 , en sont les propriétaires des Forges Malevez, Messieurs Lairesse et Pierre. De ce moment, l'ancien
Fourneau du Milieu permet la jonction facile entre les Forges Malevez et le maka de la Forge du Trou.
Signalons, pour clore ce chapitre que l'atelier de menuiserie servit, durant la guerre 1940-45, aux représentations théâtrales de l'une des deux troupes de Rouillon-
Annevoie qui, voulant monter des pièces où hommes et femmes jouaient ensemble, n'avait pas accès, de ce fait, à la salle paroissiale.
La blanchisserie d’Annevoie, ancien moulin à farine, Cartes-vue d’avant 1914.
Le linge lavé, est à blanchir sur un pré en contrebas de l’ancien Neuf Foourneau.
Le bâtiment du moulin converti en blanchisserie en 1904. A son pied, le toit de la
Forge du Trou, à côté du bief.
Carte-vue de 1928 montrant la blanchisserie d’Annevoie.
Une vue actuelle. Les bâitments ont été profondément modifiés au fil du temps.
Carte-vue Nels de 1912 montrant l’endroit où se trouvait le Fourneau du Milieu
démoli en 1962.
A cet iendroit il y aura successivement un polissoir de marbre puis un atelier de
menuiserie.
Dans le fond, on aperçoit le bâtiment de l’ancien moulin devenu blanchisserie.
Rouillon. La Forge Aminte : dessin du général de Houwen.
(1820).
A gauche, le maka, futur emplacement du Moulin Debras.
Au centre, la forge.
A droite, le bâtiment-annexe de la forge, qui sera
transformé en maison dans laquelle se trouve maintenant
un restaurant.
A l'avant-plan, la route Rouillon-Fraire.
Rouillon. Le moulin à farine construit à l'emplacement du maka de la Forge Aminte. A
l'époque, 1944, il est exploité par la famille Debras. A l'avant-plan, le bief du moulin.
Chariot arrêté le long de la façade arrière du moulin Debras à l'endroit où se faisaient
les transbordements de grains ou de farine. Photo de 1943.
La forge Aminte,ou de la forgerie au restaurant
" Le Blutefin "
L'origine très ancienne de cette forge est certaine. Elle remonte au moins à la première moitié du 18e siècle.
Il existe un testament de 1763, par lequel Jean Paul de Cesves et Madeleine Demptinne son épouse, attribuent en héritage " la forge et le maquat " de Rouillon, à
leur fils Jean François de Cesves. En 1785, ce dernier et ses soeurs s'accordent sur le partage des biens de leurs parents, de telle sorte que Jean François de
Cesves jouisse en pleine propriété de divers biens, parmi lesquels, la forge de Rouillon, dite Forge Aminte et le fourneau de la Vallette à Saint Aubin ( AEN.
Protocoles notariaux 4605. Notaire Develette ).
Lorsqu'en 1812, la Dame Jeanne Thérèse Misson veuve de Jean François de Cesves, demande la maintenance de sa forge Aminte, elle écrit qu'il est de notoriété
publique que celle-ci existe depuis des temps très reculés. Elle ajoute que si elle ne peut reproduire les titres en vertu desquels son usine a été établie c'est que
lors des passages successifs de celle-ci dans les mains des différents propriétaires, ces titres se sont égarés. ( AEN Département de Sambre et Meuse. n° 161 ).
Le 1 juillet 1813 a lieu, à l'initiative du notaire Lion et sur requête des héritiers de Jean François de Cesves, l'adjudication préparatoire de la forge Aminte.
Provisoirement, elle est adjugée pour 30.000 francs à Auguste Bauchau, maître de forges à Moulins-Warnant. Cependant il n'en sera pas i'acquéreur, puisque
l'adjudication définitive du 22 juillet est faite en faveur de Charles Donau de Tailfer, qui a proposé 40.000 francs.
Cette forge a le privilège d'avoir été choisie, vers 1820, par le général de Howen, pour être dessinée. Nous reconnaissons, de gauche à droite, le maka, la forge et
une partie de ce qui deviendra avec le temps, une maison d'habitation, aujourd'hui le Blutefin.
D'après le cadastre de 1830, le bien comprend: un maka ( 1 are 75 ) la forge proprement dite ( 1 are 50 ) , un bâtiment d'exploitation ( 2 ares 60) un by
d'alimentation ( 1 are 16 ) et un cour de 10 ares. Voir croquis en annexe.
Le propriétaire en est toujours Charles Donau, qui vend en 1845, l'ensemble du bien à Michel Donau, tanneur à Vireux ( France ). Cinq ans plus tard, ce dernier le
revend à Augustin Baivy, négociant à Yvoir. A ce moment, l'activité de la forge est arrêtée et le nouveau propriétaire va se tourner vers d'autres activités: la
meunerie et la fabrication de l'huile.
Én 1851, le bâtiment de la forge se tranforme en huilerie. En 1855 sur l'emplacement du maka démoli, A. Baivy édifie un premier moulin à farine reconstruit
totalement en 1859. Quant au bâtiment-annexe, il est transformé en une maison avec magasin.
Un incendie détruit le moulin à farine en 1868, qui ne sera reconstruit qu'en 1877. Il apparaît comme une bâtisse massive, haute de trois étages surmontés d'un
grenier. Une roue hydraulique accolée à la façade reçoit l'eau du by de l'ancienne forge Aminte. Le mouvement se transmet à des engrenages disposés dans le
sous-sol qui font tourner les meules de pierre du premier étage. Aux 2e et 3e étages se trouvent les entrepôts pour le stockage des farines. La bluterie fonctionne
sous les combles, la mouture y est amenée par des godets attachés à une chaîne sans fin.
Le moulin est exploité d'abord par la famille Baivy puis, dans les premières années du siècle par les frères Debras qui en poursuivront l'exploitation jusqu'en 1954.
Entre les deux guerres, le moulin sert surtout à fabriquer des aliments pour le bétail.
Les fermiers des environs viennent y faire moudre leurs récoltes. Leurs chariots descendent le raidillon qui mène actuellement au Blutefin, remontent la pente
opposée et sont déchargés à une porte de la façade arrière du moulin. Ils s'en retournent par le chemin qui sépare encore aujourd'hui le moulin, du bief qui
l'alimente.
Les frères Debras font eux-mêmes le commerce de grains. Entre les deux guerres, ils construisent un entrepôt près du pont de Rouillon. Les péniches chargées y
accostent et sont déchargées mécaniquement. Des chariots ou camions amènent les grains, au moulin. Notons en passant que cet entrepôt deviendra le dancing
" Le Juan " d'abord, le " Paradise " ensuite.
La famille Debras ne fut jamais propriétaire du moulin dit " d'En Haut ". En 1914, il fut vendu par Charlotte Baivy au comte Henri de Meeus de Montpellier
d'Annevoie, dont les Debras furent locataires.
Le moulin bâti sur l'ancienne forge Aminte fut démoli en 1967, de même que la petite remise voisine. Seule subsiste la roue hydraulique, maintenant verdie par la
mousse et sur laquelle l'eau en tombant fait un bruit de cascade.
Sur le soubassement du moulin, on a créé un parterre planté d'arbustes, qui délimite le parking servant aux serres d'Annevoie. Dans la maison d'habitation, de
l'autre côté de la cour, s'est installé un restaurant gastronomique, dont le nom rappelle qu'autrefois, à cet endroit fut un moulin. Il s'appelle " Le Blutefin "
Dessin du général de Houwen vers 1820
Dessin du général de Houwen vers 1820
Maison avec cascade