3.00 - Anhée. L’enseignement. 3.01 – Senenne : responsabilité du clergé Evoquons maintenant la question de l’enseignement à Anhée. Sous l’Ancien Régime c.à.d. avant la révolution française, il n’y a pas d’enseignement organisé dans les campagnes et villages. Les collèges de l’époque, généralement aux mains des ordres religieux, n’existent que dans les villes. Dans les villages, les paroisses ont pour mission d’organiser un enseignement élémentaire où l’on apprenait des notions de calcul et d’écriture. C’est au marguillier que revient la mission d’enseigner aux enfants. C’est ainsi que dans le rapport de visite de l’église de Senenne du 22 mai 1662, on peut lire ceci. Le marguillier s’acquitte bien de sa tâche et fait la classe à ceux qui veulent bien venir, à cause de l’éloignement. Il serait donc bon que les biens des pauvres fondés  pour les habitants d’Anhée ne soient donnés qu’à ceux qui envoient leurs enfants à l’école, et il serait bon de donner au marguillier un peu des biens des pauvres, car pour sa compétence il n’a rien d’autre qu’un demi-bonnier de terre et des à-côtés. Les biens des pauvres dont parle le visiteur épiscopal, étaient constitués par des dons de personnes aisées. L’argent servait à secourir les cas les plus malheureux. Les recettes et les dépenses étaient consignées dans un registre appelé ‘’le livre des pauvres‘’. Dans un autre rapport de visite d’un délégué épiscopal, daté du 9 septembre 1707, on apprend que la marguillerie est aux mains du prêtre Allard qui a chargé quelqu’un d’autre de faire l’école à sa place à Anhée. Enfin  dans un autre rapport de 1716, on lit ceci : Comme nous avons appris qu’il n’y a pas d’école dans cette paroisse éparpillée, au grand dam d’une nombreuse jeunesse, nous avons noté à tous les habitants, qu’ils fassent le nécessaire pour en construire une au plus tôt, selon les statuts de notre diocèse. Une note pour comprendre ceci : la paroisse est dite éparpillée parce qu’à ce moment, elle s’étend à Anhée, Houx, Haut-le-Wastia et Warnant. Avant l’instauration du régime français de 1795, la seule école d’Anhée est toujours localisée à Senenne, dans la maison du Marguillier. Le dernier curé de Senenne, Louis Bauchau, a pris  en la matière une curieuse initiative. Dans un rapport de 1787, il écrit  qu’afin d’inciter les jeunes à fréquenter les séances d’instruction religieuse et l’école de Senenne, il s’est engagé à leur fournir à Pâques, du linge et des vêtements. Cela lui a coûté 42 florins mais il se félicite du succès obtenu. Il signale en outre que le marguillier bénéficie d’une maison à Senenne. 3.02 – Ecole communale en 1831 L’instruction continuera donc à être donnée à Senenne jusqu’à ce que l’administration communale décide en 1829 de construire une école à Anhée. Ce sera une bâtisse en pierre d’une superficie d’une cinquantaine de mètres carrés qui s’élèvera sur un terrain communal à 40 m de la grand-route. Actuellement, elle se situerait dans la partie inférieure droite de la place communale. Le rez-de-chaussée est réservé à l’école sobrement meublée, le  1er étage à l’administration communale elle-même. Curieusement cette école ne dispose ni de vestiaire, ni de préau, ni de pompe eau. L’instituteur ne dispose ni de logement ni de jardin. L’école s’ouvre en 1831 et le premier instituteur en est Jean-Joseph Deloyer qui enseignait précédemment à Senenne. A cette époque, l’enseignement primaire n’est pas obligatoire - il ne le sera qu’en 1914-  et est réservé aux garçons et aux filles mais combien d’entre elles le fréquentent ? En 1870, le conseil communal constate enfin que le bâtiment d’école est devenu vétuste et ne possède pas d’annexes. Une nouvelle construction est décidée qui comportera  salle de classe, logement pour l’instituteur, salle du conseil communal et pour les enfants, cour et préau où se logera aussi la pompe à incendie manœuvrée à la force des bras. Cette construction deviendra  l’actuelle maison communale. Une suite de contretemps surviendra durant la construction si bien que les travaux seront retardés et que la première rentrée scolaire y sera faite en 1877.  3.03 – Guerre scolaire en 1879 Arrivons-en à la guerre scolaire de 1879. La victoire du parti libéral aux élections générales de 1879 eut une influence profonde sur l’enseignement provoquant des réactions passionnées dans les communes du royaume. La nouvelle loi scolaire prescrit que chaque commune doit posséder au moins un enseignement neutre n’organisant pas de cours de religion. De plus, les communes ne peuvent plus subsidier les écoles libres. La réaction des évêques de Belgique fut immédiate. Ils décidèrent que les instituteurs des écoles officielles et les parents qui y envoient leurs enfants, ne pourront plus obtenir le sacrement d’extrême-onction. . Les évêques prescrivent en outre, à chaque curé de paroisse d’ouvrir une école libre. A Anhée, l’influente famille Bauchau soutient le point de vue de l’épiscopat. Elle crée donc une école libre dans une de ses propriétés, la ferme dite d’Odrimont, actuellement rue des fusillés. Une remise est aménagée en salle de classe et un instituteur privé, Mr Roubaux, y donne cours aux garçons. Du fait des pressions exercées par la famille Bauchau, sur les pères de famille, des enfants sont retirés de l’école communale. Devant la commission d’enquête parlementaire instituée pour évaluer les conséquences de la loi scolaire, l’instituteur communal Armand Deloyer précisera qu’avant la mise en œuvre de cette loi, il y avait 30 élèves dans l’école communale et qu’en 1880 il n’en restait plus que 11 et 10 en 1881. Aux élections de 1884, le parti catholique revient au pouvoir et la loi scolaire de 1879 est abrogée. L’enseignement primaire à Anhée retrouve son calme et sa tranquillité. Jusqu’en 1925, il n’existe qu’un seul instituteur à Anhée qui enseigne à tous les degrés dans un seul local ce qui constitue une lourde charge pour l’instituteur qui doit passer d’un degré à l’autre. En 1925, sur injonction du ministère, la classe est scindée en deux groupes, ce qui implique l’engagement d’un second instituteur. Une cloison est élevée au milieu du seul local existant, pour séparer les classes. En 1934, l’administration communale construit un second bâtiment d’école à côté du premier. Cette situation perdurera jusqu’à ce qu’une nouvelle implantation voie le jour à la rue du Petit Bois. 3.04 – Ecole de filles : 1857 Passons à l’enseignement des filles. Jusqu’en 1856, il n’existe à Anhée qu’une seule école communale que fréquentent principalement les garçons  et encore pas tous puisque l’enseignement primaire n’est pas obligatoire. Madame Veuve Auguste Bauchau, maîtresse de forges à Moulin, s’émeut de cette situation et décide d’y remédier. Sur son terrain du lieu-dit Grand Jardin dont elle a déjà cédé une partie pour construire l’église, le cimetière et la cure, elle fait bâtir une école libre pour filles. Madame Bauchau choisit la communauté des sœurs de  Pesche pour enseigner. L’école s’ouvre pour la rentrée des classes de 1857. Une école maternelle - alors on dit gardienne- y est annexée  ce qui rencontre pleinement les vœux des mères de famille. L’administration communale est favorable à la nouvelle école et vu le succès rencontré, le conseil l’adopte. La commune pourvoira aux frais de l’enseignement et se chargera de l’ameublement et de l’entretien des bâtiments. Une convention est donc passée avec la famille Bauchau. En 1879, la loi scolaire votée par le parti libéral va désorganiser le projet scolaire. La loi, en effet, oblige les communes à ouvrir une école officielle neutre et interdit de subsidier l’enseignement libre, comme c’est le cas pour l’école des filles. Les deux sœurs enseignantes sont invitées à prêter serment à l’autorité laïque. Evidemment, elles refusent et présentent leur démission. La famille Bauchau leur vient aussitôt en aide. Pour que le ministère ne puisse remplacer les sœurs par des laïques, la convention avec la commune d’Anhée est résiliée. Un local est fourni par la famille Bauchau pour que les sœurs puissent y poursuivre leur enseignement. S’ensuit alors une guérilla entre l’administration communale et les responsables du gouvernement, la commune d’Anhée se refusant à construire une école officielle pour filles qui coûterait cher et resterait vide puisque l’ensemble des filles a rejoint l’école improvisée tenue par les sœurs. Au cours des années1881 à1884, on assiste à une bataille juridique menée par la commune d’Anhée pour échapper à l’obligation de construire une école officielle pour filles. On ergote sur le choix du terrain  qu’il faudra bien acheter Celui qui est proposé par l’autorité de tutelle ne convient pas parce qu’il est trop près de l’école des garçons, un autre parce qu’il est trop humide. On allègue aussi que la commune est trop pauvre pour se permettre la construction d’une nouvelle école. On conteste en justice et on n’avance pas. La famille Bauchau fait jouer son influence pour soutenir le point de vue de l’administration communale. La procédure est encore en cours, quand les élections de 1894 ramènent le parti catholique au pouvoir.  La loi scolaire une fois abrogée, les choses reprennent un cours normal. Les sœurs de Pesche dispenseront longtemps encore l’enseignement aux filles et géreront une classe maternelle.. Au fil du temps, les sœurs seront  secondées par des institutrices laïques jusqu’à ce que celles-ci prennent totalement l’école en charge, les vocations religieuses se raréfiant. Les deux dernières sœurs présentes à Anhée, atteintes par la limite d’âge  se retirent dans une maison d’Anhée et continuent à rendre service à la paroisse. La dernière, Sœur Bernadette, quitte Anhée en mai 1997 pour rejoindre Pesche.   Durant 140 ans, 44 religieuses se succédé à Anhée dont 29 enseignantes et 15 autres préposées à divers services. Cinq jeunes filles d’Anhée se sont senti une vocation religieuse au sein de la communauté de Pesche.
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Anhée. Synthèse historique Partie 1
1.00 - Eléments d’histoire 1.01– Evolution générale du village Cette étude a pour but de présenter un panorama général de ce que fut le village d’Anhée avant les fusions de communes, abordant tour à tour les chapitres concernant son histoire brossée à larges traits, le réseau de ses communications, l’organisation de l’ enseignement, le développement de sa vie économique. Il est logique que compte tenu des nombreux atouts que présentait le village d’Anhée, il y eut là, dès les premiers temps une installation humaine. On y trouvait, en effet, la plaine la plus large de la vallée de la haute Meuse, de bonnes terres de culture, un sol s’élevant doucement vers la ceinture des bois enserrant la plaine pour accéder au plateau de Grange également propre à la culture. Effectivement, Anhée possède des atouts naturels, aussi fut-il très tôt occupé par l’homme. La preuve la plus ancienne que nous en ayons est le cimetière gallo-romain, découvert au lieu-dit Bahivaux, lorsqu’en 1885, fut établie l’assise de la ligne de chemin de fer Dinant- Tamines. Il faut attendre le XIIe siècle pour trouver dans les textes le nom d’Anhée sous sa forme d’Anheia qui d’après l’étymologiste Carnoy, dériverait d’un mot latin- franc Angiaca signifiant «  terre aux prairies » ce qui caractériserait bien notre localité. Au XIIIe siècle, sur le plan administratif, Anhée est le siège d’une mairie importante qui s’étend de Gérin à Rivière en englobant Sommière, Haut-le-Wastia, Moulins, Hun, Annevoie et Warnant. A cette époque aussi, la mairie d’Anhée devient partie intégrante du bailliage de Bouvignes et le restera jusqu’à la révolution française, quand les Pays-Bas autrichiens ayant été conquis par les armées de la République, nos régions seront rattachées à la France, le 1er octobre 1795. Dès ce moment, Anhée fait partie du département de Sambre-et- Meuse. Il en sera ainsi jusqu’à la chute de l’Empire français en 1815. Le congrès de Vienne institue le royaume des Pays-Bas en nous réunissant à la Hollande. En 1830, la Belgique s’en détachera pour constituer un royaume indépendant. Anhée sera une commune de la province de Namur. Jetons un coup d’œil sur le territoire actuel de notre commune. On y distingue 3 parties : le village proprement dit dans la plaine, Senenne à mi- hauteur des collines bordant la plaine, Senenne qui jouera un si grand rôle sur le plan ecclésial, enfin le plateau de Grange. Examinons chacune de ces parties. Sous l’Ancien Régime, le village d’Anhée, regroupe la plupart de ses maisons sur une seule rue, dénommée alors à juste titre, la rue du village (actuellement rues des fusillés, Petit et de la libération). Il y a une raison historique à ce fait. Depuis le XIIIe siècle existe l’abbaye de Moulin. Elle possède l’entièreté du bois appelé ’’bois du canon’’ qui domine le village côté Ouest. Les terres de culture de sa grande ferme, s’étendent depuis Moulin sur le côté droit de la route allant vers Dinant et ce jusqu’au Bout des campagnes. L’abbaye en possède même dans le quartier du Caillou. Enfin, dans le centre du village, la ferme du Conseiller Dodrimont possède des terrains de culture jouxtant ceux de l’abbaye. De la sorte, la partie habitée d’Anhée se concentre autour d’une seule rue où les modestes maisons des manants ne disposent pour elles-mêmes que de petits lopins de terre. Les archives générales du royaume nous ont conservé les comptes des années 1265,1289, et 1294. Ces documents d’un grand intérêt, permettent de nous faire une idée du peuplement de nos régions puisque les « feux » ou maisons étaient taxés. A Anhée, il y avait 45 feux et par comparaison 11 à Warnant, 17 à Haut-le-Wastia, et 9 à Moulin. Si la plupart des terres d’Anhée appartenaient soit à l’abbaye de Moulin, soit à de grands propriétaires terriens, il n’est pas étonnant qu’à l’actuelle rue grande, il n’y avait que trois maisons dont l’auberge dal saulx. La république française a nationalisé en 1795 l’abbaye de Moulin et ses terres de culture. Le tout fut vendu à un acheteur français, Louis Rousseau qui laissa le domaine en l’état. Il faudra attendre son décès en 1825, pour que sa fille vende des terrains à des particuliers. C’est seulement suite à cette vente que l’urbanisation le long de la grand’route pourra commencer. En 1830, on compte à Anhée 437 habitants et on recense 53 maisons faites de pierres ou de briques, la plupart étant recouvertes d’un toit de chaume. Cette sorte de toiture provoqua d’ailleurs un spectaculaire incendie en 1861 qui dévasta 6 maisons de l’actuelle rue Petit. En 1914, on ne compte que 4 maisons au début de l’actuelle chaussée de Dinant. C’est entre 1918 et 1940, que le village s’étendra le long de cette chaussée. C’est dans les années 1950 et suivantes que se créera le nouveau quartier du « Caillou » et que notre village atteindra son développement actuel. 1.02 - Paroisse de Senenne Parlons à présent de Senenne. Ce fut le siège de la paroisse, fait attesté depuis le 12e siècle. Le domaine comprend, l’église, la maison du curé, celle des vicaires, la maison du marguillier,une petite ferme et tout proche, un douaire d’environ 2 hectares de telle sorte que la cure de Senenne pouvait vivre en autarcie. La juridiction de cette paroisse est très étendue, elle englobe Houx, Yvoir, Hun, Warnant  et Haut-le-Wastia. Au fil des ans, des églises seront construites dans ces localités, si bien qu’au moment de la révolution française la paroisse de Senenne ne comporte plus que Anhée et Haut-le-Wastia. La cure de Senenne est à la collation de l’abbaye de Floreffe qui désigne les prêtres jusqu’à la révolution. Au moment de celle-ci, le curé Louis Bauchau, est curé de Senenne. Ayant refusé de prêter serment à la république, il doit quitter sa cure et se cacher. Le domaine de Senenne, à l’exception de l’église, est vendu de même que le douaire. C’est la famille Bauchau qui rachète le domaine et le rendra au conseil de fabrique de l’église par après. L’église de Senenne sera désaffectée en 1845, celle d’Anhée construite la même année sur un terrain appartenant à la famille Bauchau laquelle en échange recevra le terrain de Senenne  sur lequel se construira le château en 1857. Grange est un vaste plateau agricole s’étendant jusqu’aux abords de Sommière. Depuis le XIIIe siècle, au moins, il y eut là une présence humaine puisque le taille en 1265, y était de 20 sols et de 4 poulailles par an ce qui correspond à la présence de 4 ménages. Le terrier du comté de Namur est plus explicite. Il y situe 2 fermes, l’une de 90 bonniers, l’autre de 60. Le Seigneur d’Anhée, Barthelemy Dautrebande, également maître de forges à Moulin acquiert les 2 fermes respectivement en 1771 et 1774. Elles seront vendues en 1825 à Auguste Bauchau et séparées dans la suite au gré des héritages. 1.03 – Bailliage de Bouvignes Abordons maintenant l’histoire de notre localité d’Anhée. Notre appartenance depuis le XIIIe siècle, au bailliage de Bouvignes nous a valu d’être mêlés aux malheurs qui découlèrent de la lutte biséculaire entre Bouvignes et Dinant, soit entre le comté de Namur et la principauté de Liège. On peut lire dans les cartulaires de Dinant à la date 5 octobre 1465 « Le IIIe jour de ce présent mois, ont nos gens esté à l’abbie de Molin et icelle arse, excepté l’église. Item en chemin ont arsé les villes de Graigne (Grange) d’Anhée et maison de Senine (Senenne) et avec ont amené en cette ville (Dinant) les bestes desdits lieux ». Ce fut donc pour notre village d’Anhée une désolation totale. La mairie d’Anhée, au sens large, devait lever une compagnie d’arbalétriers d’une soixantaine d’hommes chargés de faire le guet et en temps de guerre de défendre le château de Bouvignes. Ces arbalétriers subirent le siège de Bouvignes , lorsque le roi de France Henri II vint ravager nos régions. La chronique rapporte qu’ils furent massacrés à l’exception de 3 hommes. 1.04 – Seigneurie en 1755 En 1755, l’impératrice Marie-Thérèse érige en seigneurie hautaine, Anhée, Senenne et Grange et l’engage pour 2800 florins à Pierre de Montpellier, maître de forges à Yvoir. A cette occasion, un cerclemenage (bornage) de la seigneurie est effectué. En lisant ce rapport, on constate que les limites de la seigneurie correspondent déjà aux limites administratives de notre commune au 19e siècle. Le nouveau seigneur est reconnu comme tel  dans l’église de Senenne, le 20 septembre 1755. La seigneurie fut vendue en 1766 à Barthélemy Dautrebande, maître de forges à Moulin. Sa famille la garda jusqu’à l’abolition  des institutions de l’ancien régime , en 1793. En 1790, lors de la révolution brabançonne c.à.d. ce soulèvement des villes belges contre le pouvoir autrichien, la plaine d’Anhée fut occupée par des troupes belgiques face aux Autrichiens retranchés sur la rive droite de la Meuse notamment à Poilvache. Le régiment namurois dit des canaris occupa la cuvette d’Anhée et reprit temporairement la forteresse de Poilvache. 1.05 – Anhée dans les guerres En 1914, l’Allemagne ayant envahi la Belgique, notre village se trouve sur la ligne de front, dès le 15 août. La Meuse est défendue par des troupes françaises. Le 25 août, l’artillerie allemande ouvre le feu sur Anhée. Plus de 25 obus font des brèches dans l’église supposée être un observatoire utilisé par le Français, 20 maisons aussi sont atteintes et 6 autres incendiées. Le soir du 23,les Allemands pénètrent dans Anhée dont la moitié des habitants a fui. Après la bataille, on relève 47 soldats français tués ainsi qu’un habitant du village. Commence alors une occupation de 4 années faite de privations, d’exactions et d’oppression. Au cours des 4 ans d’occupation, les Allemands créèrent un cimetière militaire au Petit Bois où reposèrent les militaires allemands et français tombés dans les environs d’Anhée. Il était précédé d’un imposant monument circulaire en pierres de taille. Le cimetière fut désaffecté vers 1937. En 1925, la commune d’Anhée érigea, sur la place communale un monument en souvenir des victimes militaires et civiles de la guerre. Neuf noms y sont gravés : 5 militaires et 3 civils. Vingt-cinq ans après la guerre 1914-1918, un autre conflit éclata qui fut beaucoup plus dévastateur pour nos concitoyens que le précédent. L’Allemagne de nouveau envahit la Belgique le 10 mai 1940. En plus des détachements belges préposés à la garde des ponts, ce sont des troupes françaises qui ont en charge la défense de la Meuse. Le 12 mai, l’ordre d’évacuer la population est donné, celle-ci prend la route vers l’ouest, les plus chanceux  sur des chariots de ferme, les autres à pied. Déjà dans l’après-midi du 12, les pointes blindées allemandes atteignent la Meuse. Un drame va se dérouler au pont d’Yvoir. On en a reculé la destruction le plus longtemps possible pour permettre aux troupes légères françaises engagées sur la rive droite de repasser sur l’autre rive. Mais déjà vers 16 heures, un élément avancé de 5e panzer division  débouche en face de la gare et tire sur les charges des piles du pont qui doivent le faire sauter. Le lieutenant belge De Wispeleare actionne alors la mise à feu électrique qui ne fonctionne pas, un câble ayant probablement été sectionné par un tir allemand. L’officier s’élance alors vers le local où se trouve la mise à feu pyrotechnique. Il est temps car au moment où le pont saute, le 1er blindé allemand s’est déjà engagé sur le pont et a ouvert le feu. Au cours de ses déplacements le lieutenant De Wispelaere est tué d’une balle. Durant la nuit du 12 au 13, les Allemands passent par l’écluse de Houx, escaladent les pentes du Mont noir à la faveur de la nuit et à l’aube bousculent les faibles forces françaises qui venaient à peine de s’installer.  Leur attaque s’empare du château de Senenne puis se rabat vers Anhée, prenant à revers le dispositif français en défensive le long de la Meuse. Vers 11 heures du matin, Anhée est aux mains de l’ennemi. Durant les deux jours suivants, la bataille se déplace vers Haut-le-Wastia où les Français opposent une résistance solide. Mais la brèche est faite, la bataille se déplace vers l’Entre- Sambre-et-Meuse. Commence alors pour Anhée une longue occupation de plus de 4 années pendant laquelle la population ne connaîtra que deuil et privations. Arrivons-en à l’épisode le plus douloureux, la tuerie du 4 septembre 1944. Au cours des journées précédentes, les troupes allemandes étrillées durant la bataille de Normandie par les bombardements alliés ont reflué sur la rive droite de la Meuse. En face d’Anhée, a pris position la  panzerdivision  SS Hitlerjugend, composée de jeunes fanatiques du nazisme. Le 4 septembre vers midi, un détachement passe la Meuse à hauteur de la rue Ste Barbe, descend la rue du village faisant sortir des caves les gens apeurés qui s’y cachent. Les hommes sont abattus à bout portant, les femmes et enfants s’enfuient en hurlant; pendant que les maisons sont systématiquement incendiées. En entendant ces cris, Madame Dorette Sovet, ambulancière bénévole de la Croix-Rouge, sort de chez elle, rue Petit, remonte le courant des gens qui fuient et se dirige vers le détachement SS qui à ce moment est arrivé à hauteur de la rue du Bon Dieu. A la vue d’une infirmière en blanc et portant la croix rouge, les SS cessent leurs tirs et des gens échappent ainsi à la mort. S’adressant en allemand, au commandant du détachement, elle lui demande de ne pas tirer sur des civils. Durant la descente de la rue Petit, les caves ne seront plus évacuées par leurs occupants et personne ne sera abattu. Cela,  on le doit au courage de Madame Dorette Sovet. Passé l’actuelle rue Petit, les SS recommencent à incendier les maisons et abattent encore 2 hommes. Au soir de cette journée tragique du 4 septembre 1944, le bilan est lourd : 13 hommes abattus, 4 grands blessés, 58 maisons détruites par l’incendie, 15 autres endommagées. C’est dans un village en deuil et dévasté que le lendemain, l’armée américaine fera son entrée à Anhée. Pour notre village, la guerre de 1940-1945 aura été beaucoup plus meurtrière que celle de 1914-1918 : 23 hommes ont trouvé la mort soit au combat soit fusillés, 2 femmes sont tuées  lors de l’exode en 1940, une autre périt sous le bombardement  du pont de Houx en 1944. Tel est le lourd bilan de cette guerre.
2.00 - Anhée. Les communications 2.01 – La grand’ route en 1772 Abordons maintenant un autre chapitre : celui des communications principales entre Anhée et l’extérieur. Au XVIII e siècle, il en existe deux : la route de la vallée entre Namur et Dinant et la voie d’eau de la  Meuse. Sous l’Ancien Régime, les routes sont le résultat du passage habituel entre localités voisines contournant le champ et la propriété de l’un et de l’autre. Leur entretien n’est pas régulier, les assises sont faites de terre, quelquefois elles sont empierrées. La route entre Namur et Dinant fait exception puisque empruntée par des diligences ou voitures. C’est sous le règne de l’Impératrice Marie-Thérèse d’Autriche que cette route fut fondamentalement améliorée. En 1772, le Souverain Bailliage de Namur promulgue un édit pour la meilleure conservation de la nouvelle route. Elle est subdivisée en sections de 5 Km environ. Les adjudicataires de ces sections sont tenus de constituer des dépôts de pierres et de castine toutes les 4 verges soit tous les 20 mètres environ. Les pierres seront finement concassées pour  reboucher aussitôt les ornières. Ces pierres seront extraites des carrières de la bossière (Moulin) et de celle du bout des campagnes en ce qui concerne la section allant d’Anhée à Bouvignes. S’ensuivent alors tout une série d’interdictions comme par exemple de constituer des amas de fumier le long des fossés, ou de laisser le bétail paitre dans ceux-ci. A titre d’exemple, pour montrer les difficultés d’emprunter ces routes, signalons  que près d’Anhée il existe un obstacle infranchissable. A la descente de Hun vers Rouillon, au lieu-dit aujourd’hui la roche aux corneilles, de hauts rochers tombent à pic dans la Meuse. Pour les contourner, il faut remonter de Hun vers le centre d ’Annevoie et redescendre ensuite sur Rouillon. C’est sous le règne de Napoléon, qu’une entaille sera faite dans la roche pour permettre le passage des chevaux de halage. 2.02 – Navigation sur la Meuse La Meuse aussi est difficilement navigable. Non draguée, elle présente des hauts-fonds que des mariniers expérimentés doivent connaître et contourner. Seuls les bateaux à fond plat peuvent naviguer. Devant Anhée même, il existe une île s’étendant de Moulin jusqu’à hauteur  de la rue du Bon Dieu. Le bras de la rive gauche suit de près la rue du village. Quand  les travaux destinés à rendre la Meuse navigable commenceront dans les années 1850, le chemin de halage sera établi sur le bord Est de l’île. Le bras Ouest sera peu à peu asséché et comblé. Le terrain de l’île restera longtemps un terrain sans destination précise où paîtront les moutons et les chèvres des riverains jusqu’à ce qu’un camping  y soit installé en 1950. La canalisation proprement dite de la Meuse sera assurée au moyen d’écluses avec barrages mis en place à partir de 1860, en commençant par celle de La Plante-Namur. Les écluses intéressant Anhée sont celles de Hun et de Houx opérationnelles depuis 1876. Ce n’est qu’en 1873 que le pont d’Yvoir achèvera d’être construit.  Auparavant  pour se rendre à Yvoir, on traversait la Meuse à Moulin par un service de nacelles basé à l’hôtel de la Roche. 2.03 – Les lignes de chemin de fer Depuis le XIXe siècle, un service de diligences a été organisé entre Namur et Dinant avec relais de poste à Rivière pour l’échange des chevaux. On y transporte la dépêche postale, des colis et quelques voyageurs. C’est en 1862, qu’une ligne de chemin de fer, construite par la Cie du Nord Belge, va fonctionner entre Namur et Dinant, la Meuse étant franchie sur le pont ferroviaire de Houx . En cette seconde moitié du XIXe siècle, une autre ligne de Chemin de fer va également se réaliser à travers l’Entre-Sambre-et-Meuse pour relier Tamines à Jemelle avec passage par Dinant. La ligne No 150, dans le sens Tamines  Anhée est mise en service par tronçons. Celui de Tamines à Mettet est ouvert au trafic en 1879. Il faudra attendre 1890 pour que la ligne atteigne Anhée, et soit complète jusqu’à Jemelle en 1898. Une jonction établie près du pont de Houx reliera finalement les lignes Namur-Dinant et Tamines-Jemelle, permettant aux gens d’Anhée de rejoindre Yvoir en direction de Bruxelles ou de Ciney. La ligne 150, sera très active le matin, amenant les ouvriers travaillant à la fonderie St Joseph d’Anhée ou à la fonderie de cuivre de Moulin, et les ramener chez eux après 16 heures. L’usine St Joseph ayant fermé ses portes en 1958, la SNCB jugera la fréquentation de la ligne 150 insuffisante et supprimera le trafic voyageur le 26 août 1962. La ligne restera ouverte encore une vingtaine d’années pour permettre le transport des produits de l’usine de cuivre et des carrières à chaux de Floye (Haut-le-Wastia) puis ce sera la fermeture définitive. La gare d’Anhée sera démolie. Actuellement, c’est un ravel qui parcourt le circuit de la ligne 150 en suivant la vallée de la Molignée. De l’ère industrielle, on est passé à l’ère des loisirs mais cela signifie aussi la désindustrialisation de notre région !